Basto… Né du graffiti qu’il pratique dès 1989 en membre de la Oldschool marseillaise et du crew RTM, Basto œuvre très vite dans les deux domaines les plus éprouvants de son mouvement : La figuration – reléguée au déni par un art concentré sur la lettre et elle seule. Et l’abstraction – Reniée par excellence pour être l’apanage des plus grands de son rang. Mais en audacieux il s’y applique. En 1991 sans jamais abandonner murs, tags, performances, lettrages et flow qui ont partie de son quotidien, il se penche sur la toile. En passionné, il est de ceux qui savent marier ses influences entre maitres classiques et pères de son mouvement. Plus petite (qu’un mur), plus solitaire (qu’un crew) plus emblématique aussi de nouvelles perspectives (l’art et son marché) la toile permet à Basto de s’ouvrir à d’autres techniques, à un autre geste. Apaisé, approfondi, plus finement travaillé, plus serein peut-être aussi, il y prend le temps de l’expression, de l’étude et d’une audace plus plasticienne. En figuration Il mélange les calques, les pochoirs, les lignes, les effets. En abstraction il prend le temps des formes, des aplats, des arrondis et des couleurs qu’il place dans une harmonie savante et sensible. A bien l’y regarder, que ce soit en figuration ou en abstraction, tout n’est que rendu à son mouvement, à ce qui fait sa vie. Ses influences (Andy Warhol et le Pop Art) son univers fantastique (la coulure du graffiti, le cap – buse de la bombe, D2-R2 et BB8, Storm-Trooper…) Il forge alors ses formes et ses figures en attaquants, en flèches (les coulures) en mutants (de ses rêves peut être trahis ou toujours ébahis).
Mais ni agressifs ni violents ils sont juste là, permanents et avertis. Chaque trait semble nous dire qu’aucune fin n’est possible. Que tout n’est que changement. Qu’on édulcore. Que l’on maintient, que l’on enrichi. Et que même si l’on déguise, rien ne s’oublie. Ni d’où l’on vient, ni de ce que nous sommes. Si la toile se veut plus sage, plus offerte, plus accessible à un public habitué au classique, Basto s’en sert en message, en arme presque. Tout en douceur, en amusement, en figuration ou en codes abstraits, il y fait entrer tout son mouvement, toute son essence. Et le partage en subversif qu’il reste. Use de nos yeux, de nos habitudes pour nous tromper, nous détourner et mieux nous diriger vers lui, et vers son univers Graffiti. Il est aujourd’hui particulièrement difficile de faire un état des lieux du Graffiti. Tant il est riche. Et même alors qu’il l’a toujours été, il est le seul mouvement sensible, ouvert, offert aux autres et aux autres influences. On ne peut plus alors et d’aucune manière, omettre ce que le Graffiti a apporté en perspectives, créations, innovations. Outil, usages, codes, y sont piochés, parfois détournés et par d’autres plus classiques ou jugés plus nobles. Mais utilisé, éprouvé, il a su s’enrichir et se mettre au service de l’art et l’art simplement. Et chemin faisant, il ne serait pas idiot de dire que non ! Ce n’est pas le Graffiti qui se perd dans l’art contemporain, mais bel et bien l’art contemporain qui se fond dans le Graffiti. De moins en moins de clivages, de mises au ban sont générés. De plus en plus de générosité et de partages voient le jour. Et c’est exactement dans ces richesses en offrandes, en essence de son origine, en expression de sa nature, que s’impose un pur esprit Graffiti. Et c’est dans cette générosité et cette richesse que l’œuvre de Basto s’inscrit.
Membre du collectif d’artistes [Partitions :: Urbain-es]